Ces matchs de football entre ennemis sur la ligne de front
La première Guerre mondiale a été le théâtre de terribles combats, mais aussi d’instants de fraternité, comme ces matchs de football disputés, il y a 110 ans, entre ennemis sur le front.
Mise en lumière dans le film mondialement connu Joyeux Noël de Christian Carion, l’incroyable parenthèse de fraternisation autour d’un match de football a montré combien le sport pouvait être fédérateur et apporter quelques lueurs d’humanité, même dans l’atrocité de la guerre. Des hommes que tout oppose se sont rassemblés pour oublier la guerre. Dans l’une des lettres envoyées à sa famille et datée du 27 décembre 1914 reprise dans le livre « Frères de tranchées », le soldat Oswald Tilley, de la London Rifle Brigade relate l’événement inimaginable auquel il a pris part, quelques jours plus tôt sur le front, près de Ploegsteert, petite commune située au nord de la frontière franco-belge.
« Le matin de Noël, comme nous avions pratiquement cessé de tirer sur eux, un Allemand a commencé à nous faire signe, et un de nos Tommies [soldats anglais, NDLR] est sorti devant notre tranchée et l’a rejoint à mi-chemin où ils se sont salués. Au bout d’un moment, des types de chez nous sont sortis pour retrouver ceux d’en face jusqu’à ce que des centaines d’hommes, littéralement, en provenance des deux côtés, se retrouvent sur le « no man’s land » à se serrer la main, à échanger des cigarettes, du tabac et du chocolat, etc ».
Lire aussi l’article Ecrire la biographie d’un Poilu
La trêve de Noël 1914
Ce cessez-le-feu « officieux » a aussi été l’occasion de s’occuper des morts et de récupérer les corps dans le No Man’s Land. L’Histoire atteste aujourd’hui que cette trêve de Noël 1914 s’est étendue également à d’autres endroits sur le front où les soldats ont cessé le feu pour fraterniser, le temps des fêtes.
Plusieurs facteurs favorisaient ce rapprochement : la trêve de Noël concernait principalement les Allemands et Britanniques, des peuples majoritairement chrétiens. Ces élans de fraternisation ont été spontanés. Aussi, beaucoup d’historiens s’accordent à dire que la proximité sur le front a également joué. Comme les tranchées étaient très proches, chacun savait que s’il vivait dans la boue et le froid, l’autre, en face, subissait aussi ces conditions difficiles et dantesques.
Du côté Français, ces actes de fraternisation ont été moins nombreux, mais ils ont aussi existé. Il y a plusieurs années, l’historien Rémy Cazals, détaillait : « cela s’explique peut-être par le fait qu’une partie du pays était envahie par les Allemands. Ce sont des ennemis qu’on n’aime pas beaucoup et qu’on veut chasser du territoire ».
Des matchs de football entre ennemis
L’une des scènes les plus emblématiques de cette trêve de Noël 1914 a été la tenue de ce match de football avec des poteaux de fortune, à Ploegteert, entre soldats allemands et britanniques, en pleine zone de combats. Un croquis dessiné par le lieutenant Bruce Bairnsfather, l’un des acteurs de ce match de football, des britanniques a permis d’identifier le lieu de la trêve. Il pointe différents endroits : des champs de navets, les lignes britanniques et allemandes, le lieu où il a installé son abri pour dessiner…
En 1999, grâce à ses plans, des britanniques ont su retrouver ce lieu et y ont installé une croix. Elle est vite devenue un lieu symbolique grâce aux cérémonies et reconstitutions organisées par les associations patriotiques locales. De nombreux visiteurs ont pris l’habitude de rendre hommage à ces soldats et d’y déposer des ballons et écharpes de football. Dans le cadre du centenaire de la Grande Guerre, l’Union européenne de football (UEFA) a érigé, le 11 décembre 2014, un monument en mémoire de ce match de la trêve de Noël 1914, en présence de Michel Platini, président de l’instance européenne de l’époque et d’autres personnalités.
Dans son édition du 1er janvier 1915, l’édition du journal britannique « The Times » indiquait, en se basant sur une lettre d’un docteur britannique de la London Rifle Brigade que les Allemands avaient gagné ce match 3 buts à 2. Blessé un an plus tard lors de la seconde bataille d’Ypres, en Belgique, en 1915, Bruce Bairnsfather, dont les œuvres avaient connu du succès, s’est vu confier le rôle de poursuivre ses dessins pour remonter le moral des troupes sur le front.
Les carnets des poilus
D’autres élans de fraternisation se sont ensuite répétés tout au long de la Grande Guerre, mais pas de la même manière. Ayant appris ce qu’il s’était passé à divers endroits du front, dont ce match de la trêve de Noël en 1914, les autorités ont veillé à ce que ces élans de fraternité se reproduisent le moins possible. Cela n’empêche, comme les courriers des soldats étaient lus et censurés par les autorités, ces instants de paix au milieu du chaos étaient plutôt consignés dans les carnets des poilus.
Des assauts balle au pied sur le front de 14-18
Autre scène surréaliste le 1er juillet 1916, date du début de l’offensive sur le front de la bataille de la Somme. Cette journée allait devenir « le jour le plus sanglant » de l’histoire de l’armée anglaise. 60 000 combattants étaient des premières vagues et la moitié avait été mis hors combat en à peine 30 minutes. Entre le 1er juillet et le 18 novembre 1916, 420 000 hommes ont péri pour une progression de 6 miles. Mais revenons à la date du 1er juillet.
Pour transcender ses hommes et les aider à traverser le No Man’s Land pour attaquer les défenses allemandes devant le village de Montauban, le capitaine Wilfred Percy Nevill, a l’idée de se servir du football. En ce matin ensoleillé, l’objectif du 8e Est Surrey n’était plus de foncer vers la mort ou bien même de prendre le village, mais plutôt de relever le défi d’atteindre les lignes ennemies avec des ballons et de les déposer dans les lignes allemandes. C’est le mythe de « la charge du football ». Le capitaine Nevill avait fourni quatre ballons, un pour chaque peloton, les invitant à réaliser des dribbles durant leurs courses vers la tranchée allemande.
Une récompense avait été promise au soldat qui ramènerait le premier le ballon dans le camp adversaire. Sur son ballon, le capitaine Nevill avait inscrit « La grande coupe européenne – la finale – East Surreys contre Bavarois – Coup d’envoi à l’heure 0 ». Il y avait également écrit en majuscules « PAS D’ARBITRE » pour mieux inciter ses hommes à ne pas faire de sentiments lors de cet assaut balle au pied. Alors, quand la compagnie se formait et sortait de la tranchée, les commandants du peloton sifflaient le coup d’envoi de ce match contre la mort.
Deux ballons retrouvés dans les lignes ennemies
Très vite, le brave capitaine Nevill tombait dès le début de la charge, tout comme ses hommes, sous le déluge des mitraillettes ennemies positionnées derrière un épais étouffement. A la fin de de cet assaut, une fois que l’ennemi avait disparu, les soldats du 8e Est Surrey ont cherché les ballons de football et en ont retrouvé deux dans les territoires capturés. Le capitaine Nevill repose aujourd’hui au cimetière militaire de Carnoy, dans la Somme, allée E 28. Cet épisode emblématique de la Grande Guerre a été mis à l’écran lors du court métrage Play The Game de Stéphane Barbato.
Biographie : comment faire ?
Vous êtes à la recherche d’un biographe pour écrire votre biographie militaire ? N’hésitez pas à parcourir mon site. Je peux vous prêter ma plume et vous me racontez l’histoire de votre carrière militaire ou celle de vos ancêtres qui ont été sur le front. Depuis huit ans, j’écris les histoires de militaires, de gendarmes, d’anciens combattants, de blessés de guerre. Vous pouvez me contacter par téléphone, par email ou en passant par le formulaire de contact.
Ping : Biographie Poilus - Guerre 14-18 - Tranchées- Anciens combattants